L’histoire de l’iPhone commence, comme souvent, par une rumeur. Sûrement l’une des plus longues de l’histoire d’Apple, puisque pendant de longues années, les observateurs de toutes sortes ont fait perdurer une information, jamais confirmée, selon laquelle Apple préparait un téléphone portable révolutionnaire. On sait cependant que la marque a, en permanence, de nombreux projets dans ses cartons, et qu’une partie d’entre eux seulement apparaît un jour sur le marché. Maintenant que le mythe est devenu réalité, il est temps de faire un retour sur la genèse de l’iPhone…
Dès la fin des années 90, le marché de la téléphonie mobile explose : en quelques années, le téléphone portable passe d’un marché de niche pour personnes fortunées, à un marché de masse des plus lucratifs. Plusieurs fabricants se partagent la plus grosse part des ventes, avec des produits standardisés autour de normes internationales. Très vite, certains se prennent à imaginer qu’Apple profite de son savoir-faire en termes de design, d’interface graphique, et d’intégration avec l’ordinateur, pour entrer dans la danse. En parallèle, les regrets d’avoir vu le Newton disparaître au profit d’autres PDA (notamment équipés d’une version adaptée de Windows), et l’émergence du marché des Tablet-PC, dont Apple est absent, rendent vraisemblable la volonté d’Apple de contre-attaquer en mariant le meilleur des différentes technologies. Il faut dire que la marque maîtrise un grand nombre de domaines : communication Bluetooth, reconnaissance d’écriture InkWell, synchronisation iSync…
Le terme « iPhone » n’est évidemment pas dû au hasard. Depuis le 15 décembre 1999 en effet, Apple était propriétaire du nom de domaine « iPhone.org », parmi des centaines d’autres sites aux noms plus ou moins évocateurs mais non utilisés. De plus, avec l’apparition de l’iMac, de l’iBook, ou encore de l’iPod entre 1998 et 2001, il paraissait évident que si Apple devait sortir un téléphone, elle le nommerait ainsi.
C’est en 2002 que les affaires sérieuses commencent. Le New-York Times ouvre le bal en août, en revenant sur des propos de Steve Jobs, écartant définitivement l’idée de reprendre le développement d’un PDA, mais discutant de l’avenir du marché de la téléphonie mobile. Dès septembre, le magazine Science et Avenir se prend au jeu en diffusant une image bien connue sur Internet, mariage d’un téléphone aux formes arrondies et aux matières translucides, et d’un PDA miniature…
Au cours du mois de décembre, on apprend qu’Apple a déposé dans plusieurs pays les marques « iPhone », associées à différents brevets logiciels. Peu après, c’est QuickTime qui s’ouvre à la vidéo mobile avec le module 3GPP. Il devient alors difficile de faire croire que la marque n’a pas quelques projets dans le domaine de la téléphonie, même si les applications peuvent être nombreuses : téléphonie mobile, système embarqué, iPod communicant, visiophonie, messagerie instantanée… A partir de cet instant, les fausses photos volées et les vraies vues d’artistes vont se succéder à un rythme effrenné : le plus souvent, de simples maquillages de téléphones du commerce, parfois affublés d’une molette comme celle de l’iPod. Dès 2003, chaque Keynote de Steve Jobs est l’occasion de prédire l’arrivée probable d’un iPhone, bien qu’aucune information officielle ne filtre…
Au cours de l’année 2004, une information circule : Apple travaillerait sur une version embarquée d’iTunes, permettant d’acheter et de lire de la musique sur un téléphone portable. Le journal Le Figaro précise dès le début du mois de juin que c’est Motorola qui doit concevoir le fameux téléphone. Si celui-ci tarde à venir, la version Mac d’iTunes 4.9 révèle cependant, peu après, quelques secrets : on y parle effectivement d’un téléphone portable fabriqué par Motorola, de la possibilité d’y stocker de la musique, et on y trouve même une petite icone le représentant ! A nouveau, c’est Le Figaro qui vend la mèche au cours du mois d’août : le téléphone compatible iTunes, et issu de la gamme Motorola, sera dénommé RoKR. Présenté officiellement en septembre, cet appareil déçoit les utilisateurs : aucune innovation particulière, un débit de téléchargement relativement lent, une utilisation indigne des interfaces Apple… En bref, ce n’est qu’un téléphone comme un autre, tout juste capable d’acheter de la musique sur iTunes.
Alors forcément, on n’allait pas en rester là ! Voir le RoKR nominé parmi les « pires produits de 2005 » donne des idées à beaucoup : cette fois, Apple va sortir son propre téléphone portable, qui sera aussi révolutionnaire qu’un iPod, qu’un iMac, qu’un Mac ! D’ailleurs, pour s’assurer un décollage rapide des ventes, Apple se serait associé avec le géant japonais SoftBank. Enfin, c’est ce que disent les rumeurs en mai 2005. Rumeurs immédiatement démenties. Qu’importe ! Si ce n’est SoftBank, ce sera Research in Motion, le fabricant du BlackBerry, le plus célèbre des smartphones. Et ce n’est pas Peter Oppenheimer, directeur financier d’Apple, qui va décourager les fans en expliquant que l’iPod est bien meilleur que le nouveau téléphone Sony Walkman, et qu’il va encore évoluer !
En septembre 2006, ce sont les analystes financiers qui s’y mettent. Certains commencent à recommander chaudement l’achat d’actions Apple, entrevoyant un prochain iPhone au bout de leurs longues-vues. Certains pensent déjà prédire ses chiffres de vente : 8 à 12 millions pour 2007, promis ! Et c’est à nouveau iTunes, version 7, qui vend la mèche : ses ressources regorgent de messages prévus pour s’afficher lors de la synchronisation avec un téléphone portable : films, musique, émissions, et même des jeux, rien ne manque à l’appel ! Et comme si ça ne suffisait pas, on découvre le mois suivant un brevet d’Apple, qui permet à un même appareil de prendre une photo et de la localiser automatiquement sur le logiciel Google Maps, par GPS.
Au mois d’octobre 2006, tout s’accélère : une petite annonce sur le site Apple nous apprend que la marque est à la recherche d’un « Mobile Marketing Manager », autrement dit, un responsable de la commercialisation de téléphone portable ! Au mois de novembre, il se murmure que c’est Foxconn, l’actuel fabricant de l’iPod, qui serait chargé de la construction du fameux téléphone. A l’intérieur, on y retrouverait les puces PortalPlayer communes avec l’iPod. Quant à l’opérateur, ce devrait être Cingular, au moins aux Etats-Unis. Faire construire un téléphone par un constructeur qui n’y connaît rien et concurrencer des opérateurs qui vendent leurs musiques bien plus cher qu’iTunes, les défis à relever sont de taille pour Apple !
A l’approche du Keynote inaugural de la MacWorld Expo, prévue le 9 janvier 2007, les esprits s’échauffent… Sur Internet et dans les milieux bien informés, on prend les paris : iTV, iPhone, iPod grand écran, Leopard, que va présenter Steve Jobs ? Et à quel prix ? Les plus timorés pensent que, tous comptes faits, Apple attendra encore quelques mois.
Coup de théâtre quelques jours avant la conférence de Steve Jobs : le 18 décembre, la société Linksys présente une nouvelle famille de produits, dénommés iPhone. Il s’agit d’un téléphone sans fil dédié à la voix sur IP, et compatible avec Skype et Yahoo Messenger. La maison-mère, Cisco, est en effet propriétaire du terme « iPhone » depuis qu’elle a racheté Infogear, une start-up californienne qui l’avait déposé en 1996.
Le 9 janvier 2007 arrive enfin. Après quelques minutes, Steve Jobs annonce un nouvel iPod à écran large tactile, un téléphone révolutionnaire et un navigateur internet sans égal. Et ce ne sont pas trois produits, mais un seul ! Prototype en main, le patron d’Apple se lance dans une démonstration de cet outil. Pas de clavier, mais un large écran entièrement tactile, doté d’une capacité de suivre plusieurs doigts à la fois : le « multi-touch » est né. On apprendra plus tard que cette démonstration a été minutieusement préparée : l’appareil est encore très instable, et toutes les séquences ont été effectuées dans un ordre déterminé pour contourner les bugs ! De plus, Cingular a installé une antenne-relai spécialement dans la salle pour garantir la disponibilité du réseau durant la démonstration, et l’indicateur de puissance du signal a été bloqué sur la position maximale.
Au dos de l’appareil, on trouve un appareil photo numérique de deux mégapixels. Sur le dessus, une prise jack standard pour brancher ses écouteurs. Sur le côté, un compartiment pour loger la carte SIM. A l’intérieur, un disque dur flash de 4 ou 8 Go. Wi-fi, Bluetooth, réseau quadribande (la 3G n’est pas annoncée). Côté logiciel, tout y est : images, vidéos, mails, web, chat, iTunes… et même Google Maps ! Plus qu’un téléphone, c’est un Mac de poche, qui détrône tous les soi-disant « smartphones » de la planète ! A 499 ou 599 dollars selon la capacité du disque, l’appareil n’est pas donné, mais il fait rêver. Concernant les dates de sortie, on annonce le mois de juin pour les Etats-Unis, une peu plus tard pour l’Europe, et 2008 pour l’Asie : il va falloir être patient !
Plus impressionnant encore : le téléphone embarquerait une version spécifique de Mac OS X, que le fabricant nomme « OS X ». Gérant le multi-tâche, l’économie d’énergie, l’affichage avancé (transparences, animations), celui-ci n’aurait rien à envier à son grand frère. Il occuperait 500 Mo sur le disque. En revanche, pas question de développer ses propres logiciels ou d’en rechercher sur internet : l’iPhone serait une plate-forme fermée, tout comme l’iPod, et seul Apple pourrait proposer de nouveaux logiciels. Quant à savoir ce qu’il y a dedans : mystère ! Intel dément les informations selon lesquels il équiperait l’iPhone.
S’il paraît évident, dans un premier temps, que Cisco et Apple ont dû trouver un terrain d’entente au sujet du nom iPhone, les choses ne semblent pas aussi simples. En effet, quelques jours après l’annonce, Cisco poursuit Apple pour violation de sa marque déposée. On apprend alors que les deux entreprises étaient en pourparlers depuis cinq ans, et que ceux-ci se sont poursuivis jusqu’à la veille du keynote, sans succès, Apple refusant de se plier aux exigences de Cisco qui souhaitait une interopérabilité entre les produits. Pourtant, alors que l’issue du procès semble devoir se faire au détriment d’Apple, un avocat plus tenace que les autres cherche à prouver que Cisco a perdu sa propriété sur le nom iPhone, faute d’avoir renouvelé à temps les formalités administratives. La commercialisation de l’iPhone Cisco serait intervenue un an trop tard, le délai de six ans ayant expiré fin 2005… C’est finalement le 21 février que les deux marques annoncent avoir trouvé un accord, leur permettant d’utiliser le terme iPhone conjointement.
Quelques jours avant sa sortie sur le marché américain, Apple annonce que l’iPhone sera compatible avec les « applications » Web 2.0. Par ce biais, la marque propose donc aux développeurs de créer leurs propres programmes, qui se lanceront au moyen de Safari, tout en permettant de personnaliser leur interface. Apple réussit donc à concilier la sécurité et l’ouverture. Dans le même temps, on apprend que la gestion de l’énergie a été améliorée depuis les premières présentations à la presse : on obtient maintenant 8 heures de conversation, jusqu’à 24 heures de musique, et même jusqu’à 10 jours de veille. On découvre également que Google et Apple ont décidé de rendre compatible le service de vidéo YouTube avec le téléphone d’Apple, et que l’activation du téléphone se fera tout simplement par iTunes.
Enfin, le 29 juin 2007 à dix-huit heures (heure locale pour tous les magasins américains), l’objet tant attendu est mis en vente. Depuis plusieurs jours, les plus impatients avaient commencé les files d’attente devant les Apple Store et les boutiques AT&T. Difficile dans un premier temps de connaître les chiffres des ventes : 250.000, 500.000, un million ? Les boutiques se sont vite retrouvées à court de stock, même si l’approvisionnement a bien suivi. Seul bémol : en attendant les chiffres officiels, AT&T avoue n’avoir procédé qu’à 150.000 activations de lignes durant le premier week-end. Mévente toute relative, puisque même dans ces conditions, l’iPhone ferait mieux que l’iPod en son temps (150.000 ventes en deux mois), et aurait emporté en quelques heures près de 1% du marché des « smartphones »…
Toujours est-il que l’iPhone reste en haut de l’affiche. Et comme tout nouvel appareil, il attire les curieux, avides de le mettre à l’épreuve. Une première faille est ainsi découverte en quelques jours : elle permettrait de récupérer des informations à partir d’un réseau wifi, et même de faire composer des numéros à l’iPhone !
Un premier million d’iPhone est écoulé avant le 10 septembre. Parmi les clients, nombreux sont ceux qui ont tenté d’en explorer les entrailles pour le faire fonctionner avec d’autres opérateurs qu’AT&T, ou lui ajouter des applications. Le premier à y parvenir est un adolescent américain de17 ans, après cinq-cents heures de travail acharné. Quelques coups de fer à souder, pas mal de lignes de code, et voici l’iPhone disposé à converser avec les cartes SIM des concurrents. D’autres bidouilleurs lui emboîtent le pas dans les semaines qui suivent, créant des procédures de plus en plus simples, puis des logiciels débloquant automatiquement le téléphone.
Résultat immédiat : un véritable trafic s’organise. Aux Etats-Unis, où le téléphone est vendu « nu » (c’est-à-dire sans abonnement immédiat), certains ont l’idée d’acheter des iPhones en nombre, puis de les revendre débloqués à des acheteurs heureux de conserver leur forfait et leur opérateur. Au passage, les intermédiaires empochent une marge conséquente, puisque des iPhones se retrouvent vendus à 800, 900, voire 1000 dollars au marché « gris ». Pour éviter l’hémorragie, Apple décide de limiter à 2 le nombre d’iPhone que chaque client est en droit d’emporter. Il faut dire que les rumeurs sur les tractations entre Apple et les opérateurs font état de sommes faramineuses en jeu : la première toucherait des seconds jusqu’à 30% des factures de téléphonie ! C’est une véritable révolution dans le monde de la téléphonie, où l’on est plus habitués à voir les fabricants de téléphones accorder de généreuses réductions aux opérateurs pour s’assurer d’écouler leurs produits.
Dès le 5 septembre, Apple revoit à la baisse le prix de son joujou : 399 dollars pour la version 8 Go, la version 4 Go disparaissant du catalogue. Pour se faire pardonner, la pomme offre à ses premiers clients un bon de réduction de 100 dollars sur leurs prochains achats. Et pour tous ceux qui veulent un iPhone sans avoir besoin des fonctions de téléphonie, Apple décide de présenter un nouvel iPod, doté des mêmes caractéristiques techniques que l’iPhone : l’iPod Touch, à 299 dollars.
Partout en Europe, au fil des lancements officiels, on retrouve le même scénario : magasins ouverts la nuit, files d’attente interminables, et journalistes en pagaille. En Grande Bretagne, où l’opérateur O2 a raflé l’exclusivité, puis en Allemagne avec T-mobile, et en France, où la boutique Orange des Champs-Elysées accueillera 2000 personnes la nuit du lancement. Ce téléphone que certains surnomment déjà le « Jesus Phone » est élu « Invention de l’année » par le magazine Time.
Assez vite, cependant, les ventes d’iPhone apparaissent décevantes en Europe. Ainsi, en France, seuls 70.000 appareils ont trouvé preneur entre le 29 novembre et le 31 décembre 2007. En Allemagne, il faudra six mois pour en écouler 100.000. Le problème n’est pas insurmontable pour Apple, qui atteint le chiffre de 5 millions dans le même temps. Le 5 février 2008, un iPhone 16 Go vient compléter le catalogue, afin de satisfaire les audiophiles, les cinéphiles, et les photophiles (?).
En réalité, dès le lancement de l’iPhone, tout le monde n’avait qu’un mot en tête : « iPhone 3G ». Devant le tollé suscité par l’absence de cette technologie dans son téléphone, il était évident qu’Apple allait finir par l’intégrer. Steve Jobs l’avait même reconnu à demi-mots alors que le lancement de l’iPhone « tout-court » battait son plein. Les rumeurs ne feront qu’augmenter durant le premier semestre 2008, et les jours précédant la Keynote de la Worldwide Developper Conference du 9 juin 2008 verront Internet grouiller de photos, de spécificités techniques et de confidences. Steve Jobs y mettra fin en dévoilant le nouvel iPhone 3G : un dos en plastique noir ou blanc, une puce GPS, une prise audio enfin standardisée. 70 pays seront concernés par la commercialisation, à partir du 11 juillet, à un prix jusqu’à trois fois inférieur à celui de l’iPhone d’origine. En effet, Apple change également de technique de commercialisation. Plutôt que de ponctionner chaque mois l’opérateur sur le prix du forfait, Apple l’autorise à subventionner le prix d’achat. Ainsi, l’acheteur paye un produit moins cher, l’opérateur versant la différence à Apple en une seule fois.
Bien entendu, ce nouvel iPhone embarque la version 2.0 de sons système d’exploitation, qui permet notamment de télécharger des logicels d’autres développeurs. En effet, depuis le mois de mars, Apple avait rendue publique une version « beta » de son kit de développement permettant de créer de nouvelles applications pour les iPhones. De plus, le nouvel iPhone devient compatible avec le système Exchange de Microsoft, qui gère les e-mails, les calendriers, et les annuaires de contacts.
En un an, l’iPhone rencontre un succès dépassant toutes les estimations : le kit de développement a été téchargé un million de fois, et l’App Store a accueilli pas moins de 50.000 applications, elles-mêmes téléchargées un milliard de fois sur 40 millions d’iPhone et d’iPod Touch !
Il faut dire que cette année a vu la multiplications des offres au grand public. En France, par exemple, l’exclusivité d’Orange sur la vente d’iPhone est tombée en décembre 2008, et les trois opérateurs vendent maintenant le précieux téléphone. Mieux, la concurrence les a conduit a développer leurs offres, en proposant notamment la télévision par internet dès avril 2009.
Ce développement n’a pas fait que des heureux. Non seulement la concurrence peine à se maintenir à flot (l’iPhone représente ainsi 50% du trafic internet des smartphones début 2009), mais les développeurs d’application pour iPhone se plaignent de retards de validation par Apple, ainsi que de refus parfois abusifs, fondés sur des critères plutôt obscurs.
Le 9 juin 2009, devant les développeurs rassemblés pour la WWDC, Apple présente les nouveautés prévues pour iPhone OS 3.0, celui-là même qui avait été présenté en avant-première le 17 mars précédent. Cent nouvelles fonctionnaités, dont certaines très attendues : le menu « Annuler », le copier-coller, le mode paysage généralisé, les MMS, la recherche globale, le mode modem (surtaxé par l’opérateur), le support de l’HTML 5 par Safari Mobile, un service de géolocalisation de l’iPhone à distance, la location et l’achat de films sur iTunes, l’achat d’extensions dans les applications (par exemple pour ajouter des niveaux à un jeu, ou des cartes à une application GPS), le Peer2peer permettant de connecter deux iPhones… Parmi les nouveautés attendues, une vraie application GPS : Tomtom débarque sur iPhone.
Par la même occasion, Phil Schiller, remplaçant Steve Jobs, présente le nouveau téléphone iPhone 3G S. Avec un « S » comme « Speed ». En effet, celui-ci est annoncé comme deux fois plus rapide que l’actuel 3G. Dans une coque inchangée, les différents éléments sont améliorés : un processeur plus rapide (l’ARM Cortex-A8 à 600 Mhz remplace l’ARM11 à 400 Mhz), plus de mémoire (256 Mo contre 128), une puce 3G de dernière génération (HSDPA à 7,2 Mbps), un appareil photo de 3,2 Mégapixels compatible vidéo (avec un logiciel de montage vidéo intégré), le contrôle vocal, une boussole pour ne jamais être perdu en sortant du métro, un accès amélioré pour les handicapés, et une batterie plus costaud. Bref, de quoi laisser sereinement venir la concurrence.
En effet, courant 2009, deux concurrents de taille arrivent sur le marché où l’iPhone règne déjà en maître face aux Blackberry et aux rares mobiles équipés de Windows. Le premier à se lancer est Google, qui lance son système Android, qui équipe dans un premier temps le G1, mobile HTC présenté en octobre 2008. Le système donne accès à l’Android Market (l’équivalent de l’App Store), gère le multitouch (bien que cette fonction soit désactivée par défaut), et, surprise, s’appuie sur le moteur WebKit d’Apple pour afficher des pages web.
Le deuxième à se lancer est Palm, précurseur sur le marché des ordinateurs de poche, dépassé par la révolution des smartphones. Depuis l’arrivée à sa tête de Jon Rubinstein, ancien responsable de la division iPod chez Apple, la marque a recentré ses activités, à la manière d’Apple lors du retour de Steve Jobs. En particulier, la marque a abandonné le projet Foleo, sorte de petit ordinateur portable équipé d’un système prioritaire, pour se concentrer sur le lancement d’un concurrent à l’iPhone. Le Palm Pré se singularise par un clavier coulissant, évitant de s’embarrasser ainsi du clavier virtuel affiché à l’écran de l’iPhone. Plus abouti que l’Android de Google, le système WebOS de Palm convainc ses premiers utilisateurs, au mois de juin 2009. Contrairement à l’iPhone, il offre le multitâche, permettant de conserver plusieurs applications ouvertes en même temps. Son interface est agréable, bien que ses fonctionnalités restent limitées, notamment parce qu’il oblige les développeurs à se contenter de l’HTML et du javascript, là où Apple offre plus d’un millier d’interfaces de programmation.
Début 2010, Google s’implique plus avant dans la danse en annonçant son propre téléphone, le Nexus One, qu’il fabrique et vend lui-même, équipé bien évidemment de son système Android. C’est, pour Google, l’occasion de montrer aux constructeurs tiers comment « bien fabriquer » un téléphone sous Android.
Le succès ne sera pas au rendez-vous pour Palm, puisqu’il sera racheté par HP en avril 2010 sans que son système ne se soit imposé. Le second abandonnera son modèle de téléphone dès juillet, mais s’inspirera du succès de Windows en se recentrant sur le système Android, embarqué sur un nombre grandissant de téléphones (notamment au détriment de Windows Mobile et des Blackberry). EN nombre d’unités vendues, Android dépassera l’iPhone dès le premier trimestre 2010 selon certaines études.
L’iPhone 3GS connaît un lancement en fanfare, un million d’exemplaires s’en vendant en trois jours. Son modèle économique basé sur l’App Store est un véritable succès, près de 100,000 applications y étant proposées à l’automne 2009, et téléchargées plus de trois milliards de fois à la même époque. C’est dans ce contexte que la marque dévoile, le 8 avril 2010, une première version de son futur iPhone OS 4, incluant le multitâche (limité à certaines fonctions pour protéger les performances et la batterie), les dossiers d’icônes, l’aplication iBooks et d’autres nouveautés et améliorations à la pelle.
Dans le même temps, Apple travaille dans le plus grand succès à son futur iPhone « 4G » comme on le surnomme alors. Le remplaçant du 3GS est découvert, oublié (ou volé ?) dans un bar, et le site web Gizmodo en diffuse des images. Commence alors un véritable feuilleton judiciaire, Apple déclenchant une procédure pénale pour connaître les circonstances de cette fuite, ce qui conduira à une perquisition au domicile du rédacteur de Gizmodo. Une première dans l’histoire mouvementée d’Apple et des sites de rumeurs qui traquent ses nouveautés.
La présentation, officielle cette fois-ci, de l’iPhone 4, comme il s’appelle maintenant, aura lieu le 7 juin 2010 au cours d’une Worldwide Developper Conference (WWDC) qui lui sera entièrement consacrée. En plus des nouveautés apportées par l’iOS 4, comme lui aussi s’appelle maintenant, on découvre un écran d’une résolution exceptionnelle (960 x 640 pixels soit 326 points par pouces) auquel Apple donne le nom de « Retina Display » pour signifier qu’il dépasse la capacité de perception de la rétine ; on découvre également un nouvel appareil photo 5 Mégapixels d’une qualité impressionnante, doté d’un flash d’appoint, et capable également de produire de la vidéo en HD 720p ; une deuxième caméra en façade, dédiée à la vidéoconférence grâce à la technologie FaceTime ; un gyroscope sur 3 axes bien plus précis que les accéléromètres des versions précédentes ; une batterie jusqu’à 40% plus endurante ; et un processeur A4 hérité de l’iPad (bien qu’un peu moins véloce). Le tout dans 9,3 mm d’épaisseur !
La marque ne sera pas épargnée par les soucis avec ce modèle : c’est d’abord le modèle blanc qui est repoussé à plusieurs reprises suite à des problèmes de chaîne de montage ; puis, évidemment, une pénurie de modèles noirs face à la demande très soutenue (1,7 millions d’exemplaires vendus le premier week-end) ; mais aussi et surtout, une polémique enragée au sujet de problèmes de réception. En effet, Apple a choisi d’utiliser la coque métallique de l’appareil comme antenne. Plusieurs parties de cette coque sont donc séparées par de fines lignes de plastique afin d’éviter les interférences entre les différentes antennes. Cependant, le simple fait de prendre le téléphone dans la main provoquerait une mise en contact de celles-ci par la peau, qui est conductrice. Les performances de réception en seraient donc atteintes.
Le scandale est tel qu’on parle rapidement d’Antennagate ! Venant d’Apple, une telle erreur, bien que très rarement handicapante en pratique, est une aubaine pour ses concurrents qui se gaussent de ce téléphone qu’on ne doit pas tenir à la main. Apple répond en plusieurs étapes, avec un certain manque de tact : tout d’abord en publiant un comparatif sur son site web, démontrant que tous les téléphones rencontrent des problèmes similaires, puis en expliquant que c’est simplement l’indicateur de niveau de réception qui est faux, puis finalement en offrant gratuitement une coque de protection en plastique aux premiers clients du téléphone. À l’issue d’une class-action, Apple sera finalement condamnée en 2012 par la Cour du District Nord de Californie à rembourser 15 dollars à chaque acheteur d’iPhone 4, ou à leur fournir gratuitement une telle coque quelle que soit la date d’achat de leur téléphone.
Pour certains observateurs, cette crise a signé la sortie de l’adolescence pour la marque, perdant son statut de « start-up » à laquelle on pardonne tout, pour prendre pied dans l’univers des multinationales dont la gestion de crise doit faire l’objet d’une attention et d’une communication toutes particulières.